LE BONHEUR & LES TROIS CERVEAUX
"Le cerveau est en quelque sorte le quartier général, le siège social de l'organisme. C'est là que remontent l'essentiel des informations utiles à la gestion de l'individu, c'est là que se prennent les décisions stratégiques.
Le cerveau est composé de trois étages principaux correspondant à la fois à des étapes de l' évolution, et à des niveaux d'organisation spécifiques. On appelle ces trois « cerveaux » : le reptilien, le limbique et le néocortical.
Au cerveau reptilien est dévolue la gestion des fonctions physiologiques, comme par exemple la respiration, la circulation sanguine, la fonction hépatique ou la digestion.
Il fait son travail discrètement, sans «en parler à personne », c'est-à-dire sans que l'on en ait conscience, sauf lorsqu'il lui faut une intervention extérieure: il exprime alors quatre besoins physiologiques vitaux: boire, manger, dormir et faire l'amour.
Le cerveau reptilien est aussi à l'origine de nos réactions face aux agressions, c'est lui qui déclenche, en cas de besoin, les « états d'urgence de l'instinct» que Laborit a découverts et répertoriés, à savoir la peur, la colère et l'abattement.
Le cerveau limbique gère quant à lui les programmes automatiques de comportement. C'est grâce à lui qu'on peut parler, marcher sans avoir besoin d'y réfléchir, descendre un escalier, conduire une voiture tout en écoutant de la musique.
Grâce à sa capacité d'enregistrer et de reproduire automatiquement des attitudes ou des comportements, des mouvements, des actes et même des pensées, il permet l'apprentissage de toutes les techniques.
Il est programmé soit par la génétique, soit par le dressage et l'apprentissage qui peuvent être volontaires ou involontaires, conscients ou inconscients, et qui vont induire des réactions réflexes dans certaines situations (conditionnements).
Cette partie de notre cerveau est commune à la plupart des espèces animales qui, elles, n'ont pas d'autre cerveau pour réfléchir. Mais l'être humain, lui, n'est pas obligé de suivre ces instincts «animaux» qui poussent à se rassembler, à se mesurer et à se ressembler; il a accès à d'autres moyens pour définir sa voie, en l'occurrence la réflexion intelligente qui se développe dans le néo-cortex.
C’est dans la partie néocorticale de notre cerveau, et en particulier la partie préfrontale de ce néocortex, que se développe notre aptitude à raisonner, à calculer, à dessiner, à faire de la poésie ou de la musique, à chercher notre destinée.
Si le limbique fait la part la plus belle au groupe, le néocortex donne de l'importance à l'individu, au «je », c'est le siège de la personnalité. Pour faire référence au schéma de Freud, le néocortex pourrait représenter le moi, le limbique le surmoi, et le reptilien le ça.
La capacité d'analyse du néocortex est considérable. Sa finalité principale semble être la découverte de nouveaux territoires, qui donne à l 'homme sa curiosité sans cesse exacerbée d'en savoir toujours plus sur ce qui se passe là-bas, là où l'on ne voit rien encore.
C'est par le néocortex que le dessein et le destin de l'homme et de l'humanité commencent à se préciser.
Chacun de ces trois cerveaux a sa place, chacun est essentiel au bon fonctionnement de l'homme, et donc à son bonheur: le reptilien est responsable de la surveillance et de la gestion de la physiologie organique, le limbique de la conservation de l'espèce et de l'individu, le néocortex étant la source du progrès et donc de l'évolution.
Il ne semble pas y avoir de réelle hiérarchie entre eux; ils sont destinés à fonctionner ensemble, probablement de façon collégiale.
Pour optimiser le fonctionnement de sa « merveilleuse machine », l'homme doit dépasser ses réactions instinctives ou conditionnées pour laisser la place à la réflexion chaque fois qu'il lui est possible de le faire.
L'homme doit accepter son animalité originelle et présente, mais au moins autant son humanité qui représente sa véritable dimension spécifique et son destin.
Quand les trois cerveaux sont en harmonie, quand chacun fait son travail, la conscience est en éveil, c'est ce que nous pourrions appeler le bonheur."
Christian Boiron, Le source du bonheur est dans notre cerveau, Editions Albin Michel, 1998